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  • Peter Maurer sur le trône de Klaus Schwab

    Les grandes manœuvres pour la succession de Klaus Schwab à la tête du World Economic Forum ont commencé. Le 30 mars dernier, l’indéboulonnable sultan de Cologny a eu 84 ans et le poids des années commence à se faire sentir même pour lui.

    Le sujet est évidemment l’un des tabous les plus sacrés de la Genève internationale, d’autant plus qu’il a déjà valu bien des malheurs à ceux qui ont fait mine de s’y intéresser, voire pour les plus casse-cou, de briguer le poste. Tous les successeurs pressentis, y compris ceux qui ont été sollicités par le grand maitre, ont trébuché : ils finissaient par lui faire trop d’ombre, ou trop vite. On se souvient de tel grand patron de multinationale ou tel ancien président de pays, dont les noms ont disparu du ciel wefien aussi rapidement qu’ils y étaient apparus.

    L’histoire du Forum, fondé en 1971, a également été soigneusement époussetée. Je me souviens encore des confessions de feu le professeur Henri Schwamm, et d’autres membres qui appartenaient au petit cercle de l’institut de management de Conches dont Klaus Schwab était proche. Le tableau d’honneur les a rapidement oubliés. Le génie du grand homme est incandescent.

    Le style de direction du WEF, qui est devenu entretemps une organisation internationale avec statut ad hoc, pose en effet problème pour une institution internationale, qui se devrait d’appliquer à elle-même les règles de transparence et de démocratie exigées partout ailleurs. Les lois du privé n’y sont plus tout à fait applicables. Or Klaus Schwab dirige le WEF depuis 52 ans, soit un règne deux fois plus long que celui de Poutine, dont on critique beaucoup la longévité en ce moment. A Genève, seul Kenneth Roth, qui dirige Human Rights Watch depuis 29 ans avec une égale main de fer, fait aussi bien. La gouvernance monarchique semble être à la mode.

     

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  • La Zelenskimania et la réputation ruinée de la Suisse

    Alors que les pourparlers semblent progresser et que s’esquissent les premiers contours d’une solution possible en Ukraine (neutralisation et démilitarisation partielle du pays, abandon du Donbass et de la Crimée), on commence à mieux cerner les tenants et aboutissants du conflit. Cela posé, il ne faut pas s’attendre à un cessez-le-feu rapide : les Américains et les Ukrainiens n’ont pas encore assez perdu, et les Russes pas encore assez gagné, pour que les hostilités s’arrêtent.

    Mais avant d’aller plus loin, j’aimerai inviter ceux qui ne partagent pas ma vision réaliste des relations internationales à passer leur chemin. Ce qui va suivre ne va pas leur plaire et ils s’éviteront ainsi des aigreurs d’estomac et du temps perdu à me dénigrer. J’estime en effet que la morale est très mauvaise conseillère en géopolitique mais qu’elle s’impose en matière humaine : le réalisme le plus intransigeant n’empêche en rien de s’activer, y compris en temps et en argent comme je le fais, pour soulager le sort des populations éprouvées par les combats.

    Les analyses des experts les plus qualifiés (je pense notamment aux Américains John Mearsheimer et Noam Chomsky), les enquêtes de journalistes d’investigation tels que Glenn Greenwald et Max Blumenthal, et les documents saisis par les Russes - l’interception de communications de l’armée ukrainienne le 22 janvier dernier et d’un plan d’attaque saisi dans un ordinateur abandonné par un officier britannique – montrent que cette guerre était à la fois inévitable et très improvisée.

    Une guerre inévitable et improvisée

    Inéluctable parce que depuis la déclaration de Zelenski sur la reprise de la Crimée et du Donbass par la force en mars 2021, Ukrainiens et Américains avaient décidé de la déclencher au plus tard au début de cette année. La concentration des troupes ukrainiennes dans le Donbass depuis l’été, les livraisons massives d’armes par l’OTAN pendant ces derniers mois, la formation au combat accélérée des régiments Azov et de l’armée par des instructeurs occidentaux, le pilonnage intensif de Donetsk et Lougansk par les Ukrainiens dès le 16 février (tout cela resté ignoré des médias Occidentaux bien sûr), prouvent qu’une opération militaire d’envergure était prévue par Kiev à la fin de cet hiver. L’objectif consistait à répliquer l’opération Tempête déclenchée par la Croatie contre la Krajina serbe en août 1995 et à s’emparer du Donbass au cours d’une offensive éclair sans laisser le temps aux Russes de réagir, de façon à prendre le contrôle de la totalité du territoire ukrainien et à rendre possible une adhésion rapide du pays à l’OTAN et à l’UE. Cela explique au passage pourquoi les Etats-Unis n’ont cessé d’annoncer une attaque russe depuis cet automne : ils savaient qu’une guerre aurait lieu, d’une façon ou d’une autre.

    Improvisée parce que la réaction russe s’est faite dans l’urgence. Constatant que les manœuvres diplomatiques de l’OTAN – non-réponse américaine à leurs propositions, rencontre Blinken-Lavrov à Genève en janvier, appels au calme de Zelenski et médiation Macron-Scholz en février – ne pouvaient pas, ou ne voulaient pas réussir et servaient peut-être à les endormir, les Russes ont riposté d’une façon à la fois magistrale et très risquée. Ils ont décidé de prendre l’initiative d’attaquer en premier en une dizaine de jours (reconnaissance des républiques, accord de coopération puis opération militaire), afin de prendre de court les Ukrainiens.

    Et plutôt que d’attaquer de front une armée bien équipée et solidement fortifiée, ils ont décidé de la contourner par une vaste manœuvre d’encerclement/diversion, en se déployant sur trois fronts à la fois, au nord, au centre et au sud, de façon à détruire l’aviation et un maximum d’équipements dès les premières heures et à désorganiser la riposte ukrainienne. S’ils avaient laissé l’Ukraine attaquer d’abord, leur situation serait devenue critique et ils auraient été soit vaincus soit condamnés à une interminable guerre d’usure dans le Donbass. Rappelons que les effectifs russes sont dérisoires : 150 000 hommes contre 300 000 Ukrainiens avec la Garde nationale.

     

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