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  • La plaie de la désinformation économique

     

    Voilà un livre que celles et ceux qui aiment l’économie se doivent de lire. Et même les autres ! Car en ces temps de propagande géopolitique échevelée, il est utile de connaître le fonctionnement et de démasquer les mécanismes de la désinformation, qui sont les mêmes dans tous les domaines de l’activité humaine.

    Avec l’indépendance d’esprit, le sérieux et la pugnacité qu’on lui connaît, Myret Zaki dévoile donc les ruses, les faux-semblants, les demi-vérités, les vraies omissions, les biais méthodologiques, les conflits d’intérêt cachés, les études académiques sponsorisées, les chiffres trompeurs qui servent à enjoliver des résultats, ou au contraire à masquer des réalités économiques et sociales beaucoup moins roses qu’il n’y paraît.

    Premier constat : la désinformation économique vient moins du bas, des réseaux sociaux et des petites gens mécontents, que du haut, des gouvernements, des grandes entreprises et des grandes institutions. Elle résulte de la tentation de l’idéologie, qui consiste à présenter le libéralisme économique et les performances de l’Occident sous leur meilleur jour, afin de les rendre plus désirables et de déconsidérer par exemple le dirigisme à la chinoise. Et aussi de la tentation de manipuler les statistiques pour leur faire dire le contraire de la réalité et désamorcer ainsi les revendications sociales.

    Que veut dire un taux hypothécaire très bas si l’on exige 5% d’amortissement par an ? Un revenu moyen de 7500 francs par mois quand il englobe une explosion des très hauts revenus et des bas salaires qui plafonnent à 3500 francs ? Une baisse du chômage quand on n’y inclut pas les inactifs non-inscrits et les personnes en sous-emploi forcé ? Une inflation nulle quand on ne rend pas en compte la hausse continue des primes maladies ? Un PIB qui ignore le développement humain et la qualité de la vie ? Un cours de l’or, seule valeur tangible digne de ce nom, manipulé ?

     

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  • Les causes profondes de la guerre en Ukraine

    Dans les temps troublés, quand plus personne ne sait ce qui se passe et que les meutes d’indignés et de pseudo-experts submergent l’espace public de pathos et de théories oiseuses, il convient de revenir aux fondamentaux. En l’occurrence, à Montesquieu. Qui a dit deux choses importantes. La première est qu’en matière de guerre il ne faut pas confondre les causes apparentes avec les causes profondes, et la seconde qu’il ne faut pas confondre ceux qui l’ont déclenchée avec ceux qui l’ont rendue inévitable.

    Pour la grande majorité du public et des médias intoxiqués par des décennies de propagande antirusse et pour les experts de plateau qui ont oublié toute culture stratégique, la cause de cette guerre est entendue : Poutine est fou. C’est un grand malade, un paranoïaque isolé dans son Kremlin, un criminel de guerre, un satrape vendu aux oligarques, un mégalomane cynique qui rêve de rétablir l’empire des tsars, une réincarnation d’Ivan le Terrible, un dictateur déséquilibré et capricieux qui a attaqué sans raison une nation innocente dirigée par un président démocrate et courageux soutenu par de vertueux Européens. Le cadre ainsi posé - les Grands Méchants d’un côté, les Gentils de l’autre – le narratif de la guerre peut se déployer : les Russes ont bombardé Babi Yar et une centrale nucléaire, ils massacrent les civils, un génocide est en cours tandis que les Ukrainiens résistent héroïquement.

    Voilà ce qu’on resasse dans les médias depuis quinze jours. Il est en effet possible que Poutine soit fou et que le poutinisme soit la cause de la guerre. Mais ce n’est pas sûr. Il se pourrait que, au contraire, Poutine soit très rationnel, ou en tout cas aussi rationnel que ceux qui ont attaqué, affamé et dévasté le Vietnam, Grenade, Panama, l’Irak (deux fois), la Serbie (deux fois), la Syrie, l’Afghanistan, le Soudan, la Libye, le Yémen (entre autres) ces dernières décennies au prix de centaines de milliers de morts. Il se pourrait par exemple que Poutine soit intervenu en Ukraine parce que, constatant que l’Occident avait refermé toutes les options diplomatiques (mise en œuvre des accords de Minsk, non-adhésion de l’Ukraine à l’OTAN), il n’avait pas d’autre choix s’il voulait éviter que la Russie soit démembrée et transformée en colonie américaine.

    Sans remonter à l’Ukraine « berceau historique et religieux » de la Russie, on peut faire dater la cause profonde de cette guerre à 1997 quand Zbigniew Brezinski, le plus influent conseiller des présidents américains pendant trente ans, a publié son livre Le Grand Echiquier, dans lequel il expliquait que le but stratégique des Etats-Unis consistait à s’emparer de l’Ukraine et démembrer la Russie pour briser sa puissance en Europe et l’empêcher de se joindre à l’Allemagne. 1997 étant par ailleurs l’année où la première phase de ce programme s’est mise en place avec l’entrée dans l’OTAN de la Pologne, de la Tchéquie et de la Hongrie…

     

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  • Et pendant ce temps la planète brûle

    Il y a exactement quarante-cinq ans, en 1977, que j’ai publié mon premier article sur les dangers de la dégradation de l’environnement et du réchauffement climatique dans une revue étudiante. Depuis le Sommet de Rio en 1992, cela fait trois décennies que je suis avec attention la publication des rapports du GIEC. Pendant vingt ans, j’ai organisé des débats et des rencontres de presse avec les différents dirigeants de cet organisme et de l’Organisation mondiale de la météorologie. Chaque fois, ils ont sonné l’alarme. Et chaque fois, ils n’ont pas été entendus. Quelques échos dans les médias, puis la chape de plomb est retombée. Beaucoup de tintamarre, un grand festival de célébrités et un ballet d’avions privés autour des COP (les conférences sur les changements climatiques) comme la COP 21 de Paris en 2015 ou la COP 26 de Glasgow l’an dernier. Et puis plus rien.

    Bilan de toutes ces opérations : zéro. Ou presque zéro.

    Lundi, le GIEC a donc publié son sixième rapport, encore plus alarmant, encore plus fondé, encore plus chiffré que d’habitude. Il suffit d’ouvrir sa fenêtre pour constater que le printemps arrive en février, l’été en mai, et les canicules tropicales en juillet. Que nos campagnes et nos montagnes vivent en état de stress hydrique quasi permanent. Mais rien n’y fait.

    Pendant deux ans, les Européens ont vécu la tête dans le Covid et durant ces deux prochaines années ils vivront dans l’indignation antirusse et l’ivresse de la défense de « nos valeurs » face à l’ogre oriental et à la menace du nouveau péril jaune. Que diront-ils quand, dans trois mois, les incendies commenceront à décimer nos forêts, à brûler nos maisons, et que la chaleur achèvera de faire fondre nos glaciers et d’assécher nos nappes phréatiques ? Où sont passés les militants du climat qui organisaient des sit-in et des occupations de banques en 2019 pour dénoncer l’inertie des Etats ? Les écologistes qui dénonçaient l’addiction de nos entreprises aux énergies fossiles et qui bénissent aujourd’hui les achats de gaz de schiste et de pétrole de fracking américain obtenus au prix d’immenses ravages écologiques ?

     

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