Pour un journalisme aux pieds nus
Lors des dernières assises du journalisme organisées par impressum à Genève, on a débattu de la valeur ajoutée du journalisme, du journalisme participatif, des nouveaux modèles de journalisme face à internet et on s'est demandé si la communication tuait le journalisme.
Toutes questions fort pertinentes en ces temps de crise aiguë du métier de journaliste. Après 30 ans de pratique de la presse écrite à tous les échelons possibles de la profession, depuis mes débuts comme secrétaire de rédaction au Journal de Genève en 1980 jusqu'à mes activités actuelles au Club suisse de la presse, j'en viens à me demander si le meilleur moyen de restaurer le crédit et d'assurer la pérénnité de la profession ne serait pas de revenir aux sources, au métier de base, à l'essentiel, c'est à dire à un "journalisme pauvre", un journalisme aux pieds nus, débarassé de toutes ses prothèses artificielles, de ses codes et de ses rites, de son narcissisme exacerbé, des contraintes publicitaires, des armées d'attachés de presse et de communicants qui obscurcissent les choses plus qu'ils ne les rendent transparentes et compréhensibles pour le commun des mortels.
A la manière de l'"arte povere" italien qui, dans les années 1970-1980, essayait de revenir aux sources mêmes de l'art en s'affranchissant des discours obligés et des techniques à la mode pour renouer avec un art sans artifice.
Ce retour à la base, je m'empresse de le dire, n'a rien à voir avec un refus d'internet ou des nouvelles techologies de l'information. Le problème n'est pas dans la technique, qui n'est que ce qu'on en fait, mais dans la tête de celles et ceux qui s'en servent. En retrouvant la passion d'informer, de décrypter, de rendre intelligible un monde devenu opaque par surinformation et en renouant avec le respect des faits et des personnes, nous autres journalistes aurïons probablement moins de raisons de douter de notre avenir.