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En route vers la posthumanité

Les civilisations, comme les espèces, sont mortelles. C’est un truisme. Dès lors la question se pose : qu’y aura-t-il après l’homme ? Ou plus précisément, compte tenu de notre manie irrépressible de vouloir façonner le futur : que faudrait-il qu’il y ait après l’homme ?
Poser cette question, c’est déjà tirer un trait sur tout ce qui a plus ou moins sous-tendu la grande marche humaine depuis des siècles, à savoir l’humanisme, cette doctrine qui met la personne humaine au centre, sinon au-dessus de tout le reste (la nature et les animaux pour certains, Dieu pour d’autres). S’il n’a pas tout à fait réussi à pacifier l’homme et à l’élever au-dessus de sa condition, l’humanisme est malgré tout à l’origine de remarquables succès : on lui doit la culture, les arts, la science, une certaine éthique à l’égard de lui-même et des autres. Mais tout indique aujourd’hui que l’humanisme traditionnel est arrivé à bout de souffle.
L’holocauste et d’autres génocides ont fait douter de la capacité de l’homme à respecter la personne humaine. Et la tendance à un matérialisme effréné, qui gomme toute aspiration à la spiritualité et qui méprise les autres catégories du monde vivant, les animaux et les végétaux, met tous les jours en évidence les failles du vieil humanisme. La consommation comme horizon indépassable de la vie humaine, n’est pas un humanisme.

Si on laisse donc de côté le matérialisme, qui constitue davantage un instinct pavlovien porté à incandescence qu’une philosophie, deux courants de pensée s’efforcent de remplacer l’humanisme. Le premier vise à retourner à la base de l’humanité, c’est à dire à la nature, que celle-ci soit divinisée (« Mère Nature ») ou non. L’homme n’est plus au centre, il est simplement parmi. Il ne règne pas sur le monde vivant, il en est juste un rouage, un peu plus pesant, par son importance numérique et sa capacité de destruction, que les autres. L’humain ne peut rien sans la nature et il doit reconsidérer sa place, plus modeste, sur une planète dont il ne pourra jamais se passer. Ce courant de pensée est multiforme et englobe à la fois les adeptes de la deep ecology, les militants athées de la cause animale comme Paul Watson, et des mouvements plus spirituels pour lesquels Dieu n’est pas séparé de la création : il est la Création.
Le second courant de pensée essaie de s’affranchir de l’homme et de la nature en misant sur la science et la technique, c’est le transhumanisme. On doit ce terme à Julian Huxley, le frère d'Aldous Huxley, qui définit le transhumain comme un « homme qui reste un homme, mais se transcende lui-même en déployant de nouveaux possibles de et pour sa nature humaine ». Ce mouvement affirme qu'il est désirable d'améliorer la condition humaine par l'usage de la raison, en développant les techniques visant à éliminer le vieillissement et à améliorer de manière significative les capacités intellectuelles, physiques et psychologiques de l'être humain. Au risque d’améliorer la «qualité» des individus comme on améliore la « qualité » des produits, et donc, d’éliminer tout ce qui apparaîtrait comme déficient. Au fond, le transhumanisme rêve de fusionner l’homme et la machine, comme dans les films d’anticipation. Grâce aux progrès de l’intelligence artificielle, l’homme pourrait se transformer en machine, ou réciproquement, et atteindre par là l’immortalité.
Voilà où nous en sommes. Entre le matérialisme indifférent à tout, le transhumanisme cybernétique et une conception de la nature qui pousse l’homme à l’écart, il nous faudra bientôt choisir notre camp.

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