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La semaine prochaine, les 83 ambassadeurs du comité de coordination de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle vont désigner le candidat qui sera appelé à la diriger dès le 1er octobre. Six candidats (un Singapourien, une Chinoise, une Kazakhe, deux Sud-Américains et un Ghanéen) sont encore en lice.
Les enjeux sont énormes et donnent lieu à une bataille d’une férocité inouïe entre les Occidentaux, menés par les Etats-Unis, qui ont pris fait et cause pour le candidat singapourien, Daren Tang, censé représenter les pays en développement au grand dam de ceux-ci, Singapour n’ayant plus rien d’un PVD, et la Chine, représentée par Binying Wang, qui travaille depuis des décennies à l’OMPI dont est la Numéro 2 depuis dix ans. Récemment, des articles de John Bolton, ancien responsable du Conseil de sécurité de Donald Trump, et de Peter Navarro, son conseiller au commerce, ont déclaré la guerre à la candidate chinoise en termes très violent. Le ministère des affaires étrangères chinois a répliqué vertement en dénonçant les manœuvres de sabotage américaines.
Jeudi 13 février, Tania Fabergé nous quittait, trois semaines avant son 90e anniversaire, dans son domicile de Versonnex. Pour celles et ceux qui ont connu cette femme vibrante, hyperactive et qui n’avait pas la langue dans sa poche, c’est une grande page de l’histoire russe et genevoise qui se tourne.
Née à Genève le 7 mars 1920, Tania était l’arrière-petite-fille de Pierre-Karl Fabergé, le fondateur de la prestigieuse maison de joaillerie russe connue pour les célèbres œufs que les tsars Alexandre III et Nicolas II offraient à leurs épouses pour la fête de Pâques, et elle était le dernier membre de la famille à porter ce prestigieux nom.
Emigrée en Suisse après la Révolution, la famille s’est ensuite dispersée un peu partout dans le monde. Décédé à Lausanne en septembre 1920, Pierre-Karl repose aujourd’hui à Cannes. Le père de Tania, Théodore Agafanovitch, né en 1904 à Saint-Pétersbourg, s’est installé à Genève où il fut le seul des petits-fils à poursuivre le métier de joailler malgré les difficultés liées à l’émigration. Marié à une descendante d’une des plus vieilles familles de la noblesse russe et géorgienne, les Cheremetieff, il a travaillé dans son atelier jusqu’à sa mort en 1971. Près de 600 créations portent sa marque. Tania avait d’ailleurs suivi la tradition familiale et fréquenté l’école des arts décoratifs de Genève et suivi deux ans de cours à Paris dans les années 1950 avant de devoir revenir à Genève, faute de ressources.
Après quelques années comme traductrice pour le CICR, notamment à Beyrouth, elle rentre à Genève où elle devient cheffe du secrétariat du CERN qui vient d’être fondé. Elle y travaillera 38 ans, de 1957 à 1995, côtoyant le gratin de la physique contemporaine et les nombreux Prix Nobel qui font le voyage de Genève, marquant les esprits par son humour, son sens de l’amitié et son fort caractère de femme insoumise.
Tout au long de ces années, elle continue à s’intéresser à la joaillerie, complétant sa formation et les études sur l’histoire de la maison Fabergé, nationalisée par les bolcheviks après la Révolution de 1917. En cinquante ans, elle aura participé à la rédaction d’une douzaine d’ouvrages et d’une encyclopédie (publiée aux éditions Slatkine) qui font autorité en la matière. En 1996, à l’occasion du 150e anniversaire de la fondation de la marque, elle crée à Genève une Fondation à la mémoire de Pierre-Karl Fabergé avec l’aide d’autres branches de la famille et le concours de Valentin Skurlov, le meilleur expert ès Fabergé, fondation dont elle assumera la présidence d’honneur jusqu’à aujourd’hui.
Entre la petite et la grande histoire, entre l’énorme espace russe et les exiguïtés genevoises, Tania aura vécu et survécu à toutes les turbulences du dernier siècle, de la grandeur à la misère, du communisme au capitalisme, assurant à la dynastie des Fabergé sa place dans l’histoire locale et celle des arts appliqués. La marque elle-même a subi bien des vicissitudes, achetée et revendue plusieurs fois (elle est aujourd’hui dans les mains d’une société de diamants britannique), connu beaucoup de spéculateurs et de faux amis, engendré beaucoup de copies et de faux qui défraient parfois les ventes aux enchères. Mais l’intérêt qu’elle suscite n’a jamais faibli. Aujourd’hui, outre les ouvrages, Fabergé reste présent à Londres et surtout à Saint-Pétersbourg, qui lui a érigé une statue et qui, surtout, abrite le Musée Fabergé que Viktor Vekselberg a ouvert en 2013 pour présenter les pièces de sa collection. Tania disparue, l’œuvre continue de vivre sa vie.
Le scandale de Crypto AG, cette société zougoise qui fabriquait des machines de cryptage truquées au profit de la CIA et du BND allemand, est à la fois énorme et grave.
Enorme par ses dimensions dans le temps et l’espace : elle s’est étendue sur des décennies, de 1952 à 2018 apparemment, et sans qu’on sache si ses héritière actuelles, Crypto Suisse et Crypto international ont définitivement tourné la page. Et elle a concerné une masse de pays invraisemblable, puisque la moitié des Etats de la planète a été flouée. Dans ce sens, le communiqué d’economiesuisse qui appelle à ne pas surréagir prêterait à rire s’il ne faisait pas pleurer. Circulez, il n’y a rien à voir, business as usual, semble dire la faîtière de notre économie, pressée d’éviter la panique. On croirait lire un communiqué du comité du PC chinois de la province de Wuhan au début de l’épidémie du coronavirus !
Grave, parce qu’elle porte atteinte à la réputation de notre pays à l’étranger. Comment peut-on laisser entendre que trahir la confiance de cent pays clients est une bagatelle, une simple erreur du passé, alors que rien n’a été fait pour la corriger jusqu’à la fin 2019, quand le Conseil fédéral s’est enfin résolu à interdire l’exportation de ce matériel suspect ?
Car on savait. Kaspar Villiger savait, même s’il le nie aujourd’hui. Les responsables des services de renseignements savaient, tout simplement parce qu’il est impossible que nos services, qui collaborent main dans la main avec la CIA et le BND, ne pouvaient pas ne pas savoir à partir en tout cas des années 1992-1993, au moment où l’affaire Bühler a éclaté et où le BND a quitté le bateau. Le doute est en tout cas massif, et il doit être levé, car il n’est pas possible de persévérer dans l’ignorance. Et que penser de l’enquête du Ministère public qui, à l’époque, a classé l’affaire en prétendant que les machines étaient propres?
Mais le mépris affiché pour la neutralité est peut-être encore pire que le dégât d’image. On sait depuis les années 1990 et l’adhésion au Partenariat pour la paix de l’OTAN que nos autorités civiles et militaires pensent pis que pendre de la neutralité et la considèrent davantage comme un obstacle que comme un avantage pour le pays. Les articles 173 et 185 de la Constitution fédérale en vertu desquels « l’Assemblée fédérale et le Conseil fédéral doivent prendre les mesures nécessaires pour préserver la sécurité extérieure, l’indépendance et la neutralité de la Suisse » semblent avoir été passés par pertes et profits.