L’art de perdre 2000 milliards de dollars
Les milieux économiques occidentaux, qui ne se privent pas de dénoncer les inconséquences des politiciens et des Etats, seraient-ils soudain devenus muets lorsqu’il s’agit de critiquer le gaspillage monstrueux de ressources qu’a constitué la guerre menée par la coalition euro-américaine en Afghanistan pendant vingt ans ?
2000 milliards de dollars, c’est pourtant le chiffre officiel des dépenses effectuées pour un conflit qui n’a abouti à rien, si ce n’est à un désastre financier, militaire et politique. Et qu’on ne vienne pas dire qu’il s’agissait d’assurer notre sécurité, puisque celle-ci sort plus affaiblie que jamais de cette aventure.
Dans les parlements, on mégote sur chaque milliard versé ou à verser pour venir en aide aux entreprises et aux indépendants victimes de la pandémie. On s’écharpe pour rogner les dépenses et réduire des prestations sociales jugées sans cesse excessives et dangereuses pour l’économie. On palabre pendant des mois pour décider de quelques timides mesures de lutte contre les seules menaces sécuritaires qui vaillent, celles du réchauffement climatique et de la destruction accélérée de la nature. On s’alarme à grands cris du poids de la dette dès qu’une dépense d’intérêt collectif est en jeu. On refuse d’accueillir les réfugiés de nos guerres à cause de leurs coûts. On s’inquiète du sous-financement de l’innovation et de la recherche.