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Planète bleue - Page 66

  • L'agriculture mondiale et le fantôme de Staline

    Quel lien y a-t-il entre un livre sur la déportation des koulaks russes, l'Exposition universelle de Milan sur l'alimentation et des pêches vendues dans un petit supermarché provençal? Les vacances ont ceci de bien qu'elles repoussent les limites de la routine intellectuelle et permettent d'établir des correspondances impromptues entre les expériences que vous vivez.
    Le livre sur le goulag, c'est "Les Ténèbres" d'Oleg Volkov, qui raconte ses cinq condamnations à la déportation et décrit par le menu le drame des paysans arrachés à leurs terres au moment de la collectivisation et envoyés par centaines de milliers périr de faim et d'exténuation dans les camps de travail sibériens. L'expo de Milan, c'est une tentative souvent habile, parfois très pertinente mais parfois aussi très hypocrite, de répondre à une question apparemment toute simple : comment nourrir la planète? Quant au supermarché de Provence, dont le gérant produit lui-même les pêches qu'il vend dans son champ à trois kilomètres du magasin, c'est un exemple devenu rarissime d'intégration équilibrée des éléments de la chaine qui va du producteur au consommateur en passant par le vendeur.
    A la question comment nourrir la planète, le modèle libéral dominant répond en une phrase: en satisfaisant les besoins des consommateurs aux meilleurs prix possibles. Sur le principe, rien à redire. La logique est parfaite. Sauf qu'en pratique, c'est faux, et même mensonger. Car, en réalité, le système de production agricole d'aujourd'hui, n'a rien à voir avec celui d'une concurrence parfaite entre des producteurs qui livreraient leurs produits en toute transparence à des consommateurs informés : il est très proche de celui que Staline avait mis au point avec ses kolkhozes dans les années 1930.

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  • Visions d'un autre monde

    Les hasards de l'agenda, de conférences à suivre et à donner, de réunions et d'assemblées à tenir m'ont amené à labourer la moitié de l'Asie, de la Mongolie au nord de la Russie en particulier.
    Loin, très loin de la canicule et de la sordide comédie que l'Allemagne a fait jouer à la Grèce pendant ces dernières semaines.
    J'en ai tiré deux ou trois leçons réconfortantes. Rien d'original, mais autant de piqûres de rappel salutaires.
    La première, c'est que le monde ne tourne pas qu'autour de l'Europe. Au milieu des steppes mongoles, pas de wifi ni de réseau téléphonique stable, pas de canicule, pas de combat inégal entre Tsipras et Merkel ni de match incertain Etats-Unis - Iran. La préoccupation du moment, c'est le manque de pluie, les rivières à sec, le bétail qui crève de soif et les touristes condamnés à se décrasser avec quelques gouttes d'eau minérale. Cela ramène les préoccupations autour du Grexit et de la survie de l'euro à de plus justes proportions et, vu de là-bas, ce qui fait la une de nos journaux se résume à un minable combat de coqs entre une chancelière armée jusqu'aux dents et un poulet déplumé.
    Heureusement, la veille de mon départ, il a plu un peu et les Mongols étaient contents.
    La deuxième, c'est que la nature existe encore. En Suisse, en Europe, pas un centimètre carré de terre qui n'ait été arpenté, défriché, cadastré, taxé. En Mongolie, pays de 3 millions d'habitants gros comme trois fois la France, et en Russie du Nord, l'espace et la nature dominent. Plus tout à fait vierges, mais presque. La Mongolie est sale parce que les Mongols n'ont pas encore intégré que le plastique ne se dégradait pas. La Russie, elle, est propre. Mais jamais aussi bien qu'au milieu de ces immenses paysages, on ne se sent aussi proche de la nature, comme à l'aube de l'humanité presque, parce que la main de l'homme n'y a encore commis aucun dégât irréversible.
    Sentiment rare, qui ne saurait durer hélas.

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  • Le lancer de soulier yéménite

    Or donc les négociations de paix au Yémen ont lamentablement échoué. Trop tôt, pas assez préparés, les représentants des rebelles houthis et du gouvernement en exil soutenus par l'Arabie saoudite n'ont pu nouer le dialogue. L'événement qui a le mieux caractérisé cet échec restera le lancer de soulier d'une journaliste activiste pro-gouvernementale à la tête d'un rebelle houthi jeudi au Club suisse de la presse, devant 40 journalistes qui n'avaient rien d'autre à se mettre sous la dent. L'incident a aussitôt fait le tour des agences et des réseaux sociaux. Tapez "soulier yéménite" en anglais ou en arabe sur twitter et voyez comment on fait un buzz quasi planétaire. Le ministre yéménite des droits humains s'est décommandé, par peur d'un outrage similaire. Nous aurions préféré que chacun puisse s'exprimer dignement et que les négociations de paix aboutissent. Mais voilà, la paix ne se décrète pas, même à Genève.


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    →Cet péripétie rocambolesque aura au moins montré le parfait sang-froid des rebelles houthis. Déjà fortement stressée par un voyage de 44 heures entre Sanaa et Genève à cause des embûches saoudiennes, empêchée de participer à la réception prévue, la délégation houthie n'a pas bronché: elle a poursuivi sa conférence de presse comme si de rien n'était. Il est vrai que les chaussures sont moins dangereuses que les bombes. Mais en voilà qui ne sont pas prêts de perdre le Nord…

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