Calvin, Rousseau, Dunant, au secours ! Revenez vite!
Mais quelle guêpe venimeuse a piqué Genève ? Depuis quelques années, le vent mauvais de la xénophobie, de la haine, du soupçon permanent contre l’étranger, le frontalier, le requérant d’asile souffle sans pitié dans toutes les rues du canton et jusqu’aux sommets de l’Etat, qui se met à prêcher pour une « préférence cantonale » dont on se demande quel sens elle peut avoir alors qu’hier on vantait les bilatérales et la libre circulation !
C’est frappant de voir combien ce canton si fier de son ouverture et de sa Genève internationale, qui se prétend être la capitale mondiale d’à peu près tout, des droits, de l’homme, de la santé, de la propriété intellectuelle ou de la physique des particules, peut devenir tout à coup mesquin, étroit, rabougri, ratatiné. On se glorifie de Calvin, on cultive la nostalgie de la « Rome protestante », on montre avec fierté aux touristes la maison natale de Rousseau et le jardin des Délices de Voltaire, on se félicite d’avoir donné naissance à Henry Dunant et à la Croix-Rouge, on débauche sans vergogne les infirmières et les médecins européens pour soigner nos malades, et, dans le même temps, on fait la chasse aux cadres français dans les hôpitaux, on blackboule le patron de la deuxième entreprise du canton parce qu’il avait le tort d’habiter vingt kilomètres trop loin pour présider pour présider les transports publics, et on passe au crible l’administration pour être sûr qu’un frontalier n’a pas usurpé son poste.